L’anatomie des sentiments selon Mario Soldati

Portrait d’un homme déchiré entre deux femmes et deux pays, qui comprend trop tard que l’amour conjugal ne se réduit pas à une liberté perdue. Une fois encore, Mario Soldati s’emploie à déconstruire les mécanismes de la passion et à décrypter l’énigme humaine, ses zones d’ombre, son ambiguïté profonde, ses motivations opaques. Moins puissant et moins complexe que les Lettres de Capri, l’ Épouse américaine envoûte cependant par son écriture d’une grande limpidité.

Manuel Alvarez Bravo, "la Bonne Renommée endormie", 1938-1939

« J’ignore pourquoi je me retournai à ce moment là. » Cette phrase n’a l’air de rien. Prise dans la masse de mots d’un roman, elle passerait sans doute inaperçue. Mais placée en incipit – alors que celui qui la formule intérieurement évoque l’instant où il devait sceller son mariage d’un oui franc et décidé – son effet est tout autre. Elle capte d’emblée notre curiosité en interrompant le cours d’une action qu’on est sur le point de découvrir. Mieux, elle annonce la tonalité du récit et sa structure : une analyse introspective et rétrospective d’un homme dont la vie se trouve bouleversée par l’intervention du hasard, de la fatalité ou du destin, quel que soit le nom que l’on donne à cette force étrangère à notre volonté.

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